Le cosplay, néologisme issu de la contraction des termes « costume » et « play » a connu, depuis le Japon des années 90 (où il est probablement né), un succès grandissant et universel.
D’abord réservé aux nerds qui vivaient leur passion dans le secret des conventions – événements organisés en l’honneur d’univers fictionnels – cette pratique s’est progressivement ouverte au grand public, tout particulièrement grâce à internet.
Une démocratisation qui fait parfois oublier le sens profond de cette vocation, à la fois volonté d’évasion et réconciliation avec soi-même.
La lente démocratisation du cosplay
Souvent mal compris, voire raillé dans ses jeunes années, le cosplay a bénéficié du Japon de la popularisation de la culture geek via les communautés en ligne, que ce soit dans les jeux vidéo comme avec Dragon ball ou dans sur plateformes comme Reddit ou 9gag.
Néanmoins, cette vulgarisation, si elle a permis de réduire l’incompréhension générale face à cette activité, n’a pas eu que des effets positifs.
Si elle a d’une, part, encouragé une professionnalisation des pratiquants, portant le niveau global vers des sommets de fidélité aux personnages originaux, elle a du même coup favorisé une atmosphère plus compétitive, pas forcément fidèle avec l’esprit premier de la discipline.
De plus, le grand public reçoit souvent une image erronée du cosplay, centrée sur des personnages affriolants et dénudés, qui, s’ils ne sont pas en soit critiquables, ne reflètent pas la diversité de costumes et de physiques qui s’expriment dans les conventions.
C’est pourquoi nous avons, dans cet article, cherché à revenir à la source de cette passion du déguisement, pour en extraire l’authenticité.
D’autant plus que, si démocratisation il y a, celle-ci reste très relative et le nombre d’adeptes, surtout en France, assez réduit.
Un désir d’évasion
Pour expliquer pourquoi ces passionnés passent autant de temps à confectionner méticuleusement des costumes de cosplay leur permettant de ressembler à leur héros, la piste la plus simple est sans doute celle du besoin d’échapper à la réalité.
Souvent victimes de quolibets pour leur différence et leurs centres d’intérêts jugés futiles par leurs camarades ceux qu’on appelle nerds – et qui souvent se revendiquent comme tel – ont développé en grandissant une capacité hors du commun à se projeter dans des univers différents, leur permettant d’échapper à une réalité inhospitalière.
Ce désir, que nous partageons tous, ils ont fait le choix de le transformer en véritable art de vivre, appliquant un soin extraordinaire à peaufiner chaque détail de leur monde parallèle afin que celui-ci soit le plus vraisemblable possible. Au Japon, cet art est pour beaucoup presque une religion.
Mais cette application, ce dévouement envers un univers imaginaire possède aussi des contreparties dans le monde « réel ». Voici d’ailleurs comment se créer un cosplay, c’est aussi hériter des qualités du personnage auquel on cherche à ressembler. Ainsi, même si on n’a pas le physique de Vegeta, de Luffy ou de Sailor Moon, on peut, grâce au costume, s’en prévaloir pour un instant, et puiser dans cette performance l’énergie pour affronter le monde réel.
Se déguiser pour mieux se connaître
Cependant, lorsqu’on lit des témoignages de cosplayers on se rend compte que ce désir d’altérité peut aussi, paradoxalement, avoir pour fonction une reconnaissance de son identité personnelle, de sa propre individualité, et ce, de deux manières.
D’une part, on endosse un costume de cosplay pas uniquement en fonction de ce que l’on désire devenir, mais de ce que on sait déjà être en puissance. C’est une manière d’affirmer et d’incarner un trait de sa personnalité, de trouver le courage de se montrer, par analogie, à la face du monde. Ici, le grimage est un symbole, un totem, presque notre daemon platonicien.
Mais c’est aussi dans tout ce qui accompagne le cosplay que celui-ci est producteur, révélateur d’identité. Non seulement, par sa laborieuse conception, il confère à son créateur un savoir-faire unique dont il peut se prévaloir, mais il lui permet aussi de se placer, de se reconnaître au sein d’une communauté qui sait reconnaître son talent et saisir le message qu’il adresse au monde en se déguisant.